
Que ce soit aussi bien l’énergie solaire que la biomasse, la Côte d’Ivoire dispose d’un important gisement dont une bonne exploitation devrait lui permettre d’accroitre la part de ces deux sources d’énergie dans le mix- énergétique ivoirien. Et pourtant… Dossier
Selon des experts, la Côte d'Ivoire dispose du gisement de biomasse le plus important d'Afrique. L'énergie biomasse est la forme d'énergie la plus ancienne utilisée par l'homme depuis la découverte du feu à la préhistoire. Cette énergie permet de fabriquer de l'électricité grâce à la chaleur dégagée par la combustion de ces matières (bois, végétaux, déchets agricoles, ordures ménagères organiques) ou du biogaz issu de la fermentation de ces matières, dans des centrales biomasses. « La Côte d'Ivoire a un très beau potentiel de biomasse. Ce pays en a plus que tout autre pays en Afrique », révèle Mahama Kappiah, le directeur général du centre des énergies renouvelables de la Communauté économique des Etat de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao).
Quant à M. Sabati Cissé, le Directeur général de l’Energie au ministère ivoirien du Pétrole et de l’Energie, ne dit pas le contraire quand il ajoute : « Avec un potentiel de biomasse de 12 millions de tonnes par an, la Côte d'Ivoire bénéficie de 2700 heures de temps d'ensoleillement »( voir tableau) Dans les détails, des experts ajoutent que la durée d’ensoleillement de la Côte d’Ivoire varie entre 2 000 et 2 700 heures par an selon les régions.« Ces données suffisent à convaincre de l’existence d’un potentiel pouvant satisfaire largement les besoins énergétiques de la population, notamment rurale, selon les technologies en place. On note que les régions du Nord et de l’Ouest sont mieux loties que celle du Sud dans laquelle le taux de couverture de l’électricité est élevé »ont révélé des experts internationaux et autorités nationales à la faveur d’un panel, dans la mouvance du Forum investir en 2014.
Un potentiel indéniable qui n'attend que des projets bien formulés pour avoir des financements. Mais pourquoi les choses trainent tant et qu’attend la Côte d’Ivoire pour mettre en route sa transition énergétique ? De l’avis du ministre de l'Environnement et du Développement durable, Rémi Allah-Kouadio, « le gouvernement ivoirien prépare la transition énergique à travers la prise de mesures institutionnelles et règlementaires, notamment de nombreux projets de loi en cours d'adoption. Le secteur privé doit être le moteur de cette transition énergétique. Le gouvernement ivoirien veut atteindre en 2020, une part de 15% pour l'énergie renouvelables à base de biomasse » En attendant de mette le cap sur la barre des 15% d’énergie renouvelable, dans l’offre énergétique ivoirien, il est à rappeler que s’agissant du solaire, très peu d’actions ont été menées jusqu’alors pour donner toute sa valeur à l’énergie solaire.
En effet, les pouvoirs publics semblent réticents à créer un cadre réellement propice à son développement. Toutefois, des opérateurs économiques privés essaient, tant bien que mal, de valoriser l’énergie solaire en Côte d’Ivoire. Dix à vingt ans en arrière, l’énergie solaire n’était qu’une vue de l’esprit, car les ivoiriens n’y avaient pas accès. Seuls des ressortissants étrangers et quelques privilégiés pouvaient s’offrir le luxe d’un dispositif d’énergie solaire à domicile. Une raison simple à cela : cette énergie, dite renouvelable, était excessivement chère. Il fallait débourser un minimum 5 à 10 millions Fcfa pour être équipé au solaire.
Et les quelques sociétés qui faisaient la promotion du solaire en terre ivoirienne n’avaient guère d’audience. Quel paradoxe pour une Côte d’Ivoire très ensoleillée ? Toutes leurs démarches relatives à la baisse des prix des panneaux solaires, à la défiscalisation des équipements solaires, aux facilités d’accès pour l’installation par des entreprises spécialisées étaient sans issue. La raison est bien connue, celle de la concurrence que le solaire était censée relever vis-à-vis de l’énergie électrique classique. Celle est fournie par les barrages hydro électriques, les centrales thermiques qui fonctionnent au gaz naturel.
La Compagnie ivoirienne d’électricité (Cie) est en effet, depuis toujours, le seul acteur du marché à vendre de l’électricité aux ménages. Depuis quelques années, en tout cas, depuis la fin de la crise de 2011 et face à l’immensité des besoins en ressources énergétiques de qualité à coût compétitif, les lignes semble t-ils commencent à bouger au niveau du gouvernement ivoirien. Il est même annoncé une fin prochaine du monopole sur la commercialisation de l’électricité détenu par de la Compagnie ivoirienne d’électricité,( Cie).
Pourquoi donner de la place au solaire ?
Connaissant les nombreux avantages qu’offre le solaire, les décideurs ont toujours protégé leurs intérêts au détriment d’une source d’énergie qui viendrait résoudre plusieurs problèmes de développement. Pourtant, plusieurs localités du pays sont encore plongées dans l’obscurité et l’énergie solaire est une très bonne alternative. Mais l’Etat ivoirien a montré quelque réticence à s’engager dans un soutien à cette alternative.
Fort heureusement, les choses ont progressivement évolué et l’on arrive aujourd’hui à un stade où le solaire commence, enfin, à rayonner quelque peu, et même si les pouvoirs publics n’ont pas véritablement évolué dans leur manière de voir, les acteurs du privé ne dorment pas sur leurs lauriers. A travers l’Association ivoirienne des énergies renouvelables (Aiener), le président Boraud Edi et ses pairs continuent de se battre pour que l’énergie solaire ait la place qu’il mérite.
Et les populations ivoiriennes, ont, elles aussi, commencé à répondre aux offres du solaire. C’est plus qu’une nécessité pour les pays africains qui bénéficient d’une source intarissable de soleil d’aller. Les experts en la matière conviennent de la nécessité pour les Etats africains d'aller aux sources d'énergies renouvelables, estimant que les énergies traditionnelles risquent de ne pas pouvoir répondre aux besoins d'une démographie galopante.
Bamba Mafoumgbé